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Rétrospective Luchino Visconti

Rétrospective Luchino Visconti
Cinémathèque suisse

2018. 11. 1. - 2018. 12. 20.

Hommage au cinéaste italien (du 1er novembre au 20 décembre), avec quatorze de ses films dont la projection d’Il Gattopardo au Capitole
L'héritage de Luchino Visconti


Il y a quelques semaines, lors de la 75e édition de la Mostra Internazionale d'Arte Cinematografica de Venise, le mythique Grand Hôtel des Bains 
du Lido, là où Thomas Mann situa Morte a Venezia et où Visconti tourna 
une partie de son film homonyme, a rouvert ses portes le temps d’une exposition consacrée à la Mostra. En traversant la salle Visconti, je ne pouvais pas m’empêcher de penser aux images du film, aux échos de 
la Symphonie n° 5 de Gustav Mahler, au déclin de ce majestueux hôtel 
et à l’opportunité de reproposer aujourd’hui l’œuvre de Luchino Visconti, cinéaste, metteur en scène et écrivain, souvent traité de passéiste par 
les jeunes générations.


Descendant des nobles Visconti de Milan, Luchino doit à sa famille l’amour de la musique, du théâtre, de l’opéra, du mélodrame et de la littérature. Voyageur assidu dans les années 1930, il fréquente à Paris 
les milieux proches du Front Populaire et du Parti communiste, Cocteau, Gide, Kurt Weill et Jean Renoir pour lequel il est assistant et costumier sur 
le tournage d’Une partie de campagne. En quittant Milan pour Rome en 1939, il fait la connaissance du groupe de critiques de cinéma de la revue Cinema. C’est avec eux qu’il écrit une libre adaptation de The Postman Always Rings Twice de James Cain et réalise son premier film, Ossessione, en 1943. Jugé vulgaire et grossier par l’ordre établi, ce film marque une rupture avec 
le cinéma du régime et devient le manifeste du mouvement néoréaliste. Dans La terra trema (1948), adaptation du roman de Giovanni Verga, de facture quasi documentaire et tourné avec des acteurs non professionnels en dialecte sicilien, Visconti dénonce les conditions sociales des classes les plus défavorisées. Mais après avoir tourné Bellissima (1951), il semble abandonner les codes du néoréalisme. Ce que confirme Senso (1954), 
un film qui déclenchera l’une des batailles critiques les plus sanglantes de l’histoire du cinéma italien : trahison ou dépassement du néoréalisme ? Visconti, cinéaste réaliste ou conservateur ? Aujourd’hui, cette polémique semble stérile. Visconti déclarera même : « Le néoréalisme a été un point 
de départ pour ces artistes qui croyaient que la poésie naît de la réalité. Mais cela est en train de devenir une étiquette absurde qui, au lieu de désigner un moment, devient limitation… ».


A bien regarder, les deux orientations cohabiteront dans tout le cinéma viscontien : si, dans ses premiers films, on trouve déjà des grands souffles épiques, le néoréalisme persiste dans ses mélodrames et côtoie une recherche esthétique de plus en plus raffinée. Dans toutes ses fresques historiques, Visconti s’interroge sur la possibilité de représenter l’Histoire en mettant en scène le passé à partir du présent. Mais l’optimisme pragma-tique de sa première période s’effondre ensuite. Derrière la déchéance de l’aristocratie, la décadence des grandes familles nobles (La caduta degli dei) ou des familles de prolétaires (Rocco e i suoi fratelli), Visconti peint l’agonie 
de la classe aristocratique et l’échec de l’émancipation du peuple.


Ce pessimisme nous renvoie aux mots de Tancredi dans Il Gattopardo : « Il faut que tout change pour que rien ne change ».


Chicca Bergonzi

Les autres films de la rétrospective

L’hommage à Luchino Visconti se poursuit sur les écrans de la Cinémathèque suisse à travers une quinzaine de films qui interrogent 
les dysfonctionnements de l’homme et de ses rapports familiaux. 
L’occasion de (re)découvrir les premiers pas néoréalistes du cinéaste (Ossessione, La terra trema), l’incontournable Rocco e i suoi fratelli, 
le portrait d’une mère à la dérive incarnée par l’immense Anna Magnani (Bellissima) ou encore L'innocente, sublime film-testamentaire d’après Gabriele D'Annunzio.